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  le blog soueich

Toute l'actualité du monde, de la France, du Comminges, de Soueich. Informations alternatives aux médias menteurs.

Maison après maison

Maison après maison, l'expulsion des Palestiniens de Jérusalem continue-La population de Silwan résiste


AUTEUR:  Joharah BAKER

Traduit par  Esteban G., révisé par Fausto Giudice


Il y a des gens dont les visages reflètent les difficultés qu’ils ont dû affronter tout au long de leur vie. Salah Shweiki est l’une d'elles. Assis sous la grande tente dans le quartier Bustan de Silwan, en cherchant la tiédeur du feu de bois dans une vieille brouette, Shweiki laisse émaner l'aura d'un ancien sage. Avec ses 56 ans, il a en a vu beaucoup, trop peut-être, mais aujourd'hui il est déterminé, son visage décidé et sa volonté de fer solide.


Destruction de maison sous bonne garde à Silwan. Photo Reuters

Salah Shweiki est l’une des quelque 1.500 personnes qui sont menacées d'expulsion de leur maison par la municipalité israélienne de Jérusalem. Selon l'avis de d’expulsion distribué aux résidents du quartier Bustan, les démolitions se poursuivent sous prétexte de l’absence d’autorisations de construire. Une fois que les maisons seront détruites, Israël projette de construire à sa place un parc national, un parc qui selon leurs experts en archéologie, fait partie de l'ancienne Ville de David.

Shweiki balaie toutes ces explications et dit que l'ordre de délogement fait partie d'un plan plus vaste pour Jérusalem, qui est celui d'expulser de la ville le plus grand nombre possible de Palestiniens.

Si l’on examine les récentes activités d'Israël à Jérusalem, on peut dire que Shweiki a frappé dans le mille. Silwan a été accablée par des ordres israéliens de démolition durant des années, beaucoup de ces démolitions ont été ordonnées depuis 2005. Les résidents de Silwan disent que les accusations que leurs maisons sont construites sans l’autorisation de construire israélienne sont absurdes, puisque la majorité d’entre elles ont même été construites avant qu'Israël n’occupe la ville en 1967.

Shweiki, par exemple, dit qu'il a les titres de propriété de sa maison et de sa terre, qui remontent à l'époque du mandat britannique, et qui démontrent même que la maison a été construite avant cela. « En plus », il dit, « celle-ci est une terre Waqf », en référence à la Dotation Islamique, qui gère les affaires administratives des zones musulmanes de Jérusalem. « Les terres Waqf ne peuvent pas s’acheter ni se vendre », ajoute t-il, par conséquent, aucun crédit ne peut être accordé à certaines réclamations prétendant que les Palestiniens avaient vendu leurs terres aux colons qui ont occupé ces dites résidences au cœur de Silwan.

 

En rouge, le quartier d'Al Bustan

 

 Si ces ordres de démolition sont appliqués, Israël affirme qu'il reclassera les résidents dans d'autres zones de Jérusalem-Est, principalement aux alentours de Beit Hanina et de Shufat. Les habitants du quartier Bustan de Silwan ne veulent pas entendre parler de cela, puisqu'ils affirment qu’ils combattront contre ces ordres israéliens bec et ongles. « Avant de nous arracher notre terre, ils nous arracheront nos vies », dit Shweiki d’un ton de défi.

Il n'est pas le seul à réagir de cette manière. Au moins dix autres hommes sont assis avec lui sous la tente, buvant du café et du thé autour du feu. Un autre homme, Abed Shaloudi, dit que les résidents ont créé le Comité Public pour la Défense du quartier Bustan de Silwan, afin d'attirer le plus grand nombre de médias et l'attention internationale sur leur difficile situation.

Shaloudi lui-même n’en est pas à ses premières épreuves. Il a passé 10 ans dans une prison israélienne pendant les années quatre-vingt-dix, période durant laquelle les colons juifs ont réclamé sa maison. Il est encore dans sa maison, mais il reconnaît qu'il ne sait pas quand viendra le jour où les colons l'obligeront à l'abandonner sur ordre judiciaire.

La jeunesse de Shaloudi se reflète dans ses convictions passionnées. Il dit que les représentants de plusieurs médias les ont rencontrés, des émissaires de l'ambassade l'Egypte et des groupes européens sont venus jusqu’à leur tente. Il a un livre de visites dans lequel il demande à tous qu'ils signent comme preuve qu'ils sont venus en solidarité. Il a de grands espoirs que leurs actions feront une différence. « Nous projetons une marche à partir de Sheikh Jarrah jusqu’à Al-Bustan », dit-il, en se référant à un autre quartier de Jérusalem-Est qui est sous le feu constant des colons israéliens et des confiscations. « Nous espérons aussi pouvoir former une chaîne humaine d'enfants autour de tout Silwan ».

Tous ces efforts sont honorables et pourraient certainement attirer l'attention sur l'injustice infligée à Silwan. La question est, seront-ils suffisants pour arrêter les démolitions ? Si nous nous fions à l'histoire, cette probabilité est assez faible.

Voyons, par exemple, Sheikh Jarrah. Pendant des années, les colons se sont approprié les maisons du quartier en affirmant qu'ils ont des titres de propriété qui remontent à avant 1948. Alors qu’ Israël insiste sur le fait que les familles palestiniennes dont les maisons ont été saisies disposent de ressources légales dans le système judiciaire israélien, c’est une piètre consolation. Le mieux que nous pouvons espérer est une suspension de l'ordre d’expropriation ou de démolition pour quelques mois de plus, dans le meilleur des cas pour quelques années, mais jamais une révocation. La dernière appropriation des colons a été la maison d'Um Kamel, qui a fini dormant sous une tente avec son vieux conjoint (qui est mort plus tard après son expulsion), tandis que les colons s’étaient installés dans leur maison.

À Silwan, Jabal Al-Mukabber et dans la Vieille Ville, les histoires diffèrent seulement dans les détails. Les réclamations de propriété par les juifs gagnent presque toujours contre les années de possession et l’héritage familial des Palestiniens. Le problème avec cette logique est multiple, d'abord le fait qu'il est unilatéral. En 1948, les Palestiniens étaient propriétaires de leurs maisons dans ce qui actuellement est Jérusalem-Ouest et vivaient dans leurs maisons léguées par leurs parents et leurs grands-parents. Le fait qu'ils aient le titre de propriété original et authentique de ces maisons de l'autre côté de la ligne de division de la ville est complètement insignifiant pour Israël, qui fait abstraction de toute revendication palestinienne dans ce qui est aujourd’hui Israël.

Et si ce n’était que cela ! Israël a systématiquement refusé d'accepter même le principe du droit de retour sur la base que tout afflux important de réfugiés palestiniens vers Israël pourrait altérer le caractère juif de l'État. Par malheur, ses aspirations, vont au-delà d’Israël même. En Cisjordanie et à Jérusalem-Est, Israël a construit des dizaines de colonies juives au cœur du territoire palestinien occupé et y a installé 500.000 colons juifs. À Jérusalem, la question la plus épineuse de toutes celles relatives au statut définitif, est qu’Israël continue à s’approprier de la terre palestinienne et des droits de résidence en essayant de vider la ville du plus grand nombre possible de résidents arabes palestiniens.

Par conséquent, il est difficile de ne pas être d'accord avec Salah Sheweiki. Quand il dit que dans cette bataille il ne s'agit pas de Silwan, mais de Jérusalem, il a raison. Quand il affirme que la question ne se réfère non seulement aux bâtiments mais aussi à la terre, je ne peux qu’acquiescer. À Jérusalem, Israël ne cache pas ses intentions. Pour faire d'elle la capitale éternelle des juifs, il doit libérer la ville de ceux qui osent défier cette affirmation. C’est lamentable, mais comme chacun peut le voir, c’est cela qui est en train de se faire, une maison après l’autre.

Silwan 21.04.08 by MachsomWatch.
Immeuble de sept étages de colons juifs construits sans permis   en plein milieu de Silwan. Les colons s'y sont installés en pleine nuit en 2004, sous la protection de l'armée.  Photo Ruth Ottolenghi www.machsomwatch.org/ 

 


Source : Expelling Jerusalem's Palestinians, One House at a Time

Article original publié le 2/3/2009

Sur l’auteure

Eseban G. et Fausto Giudice sont membres de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette traduction est libre de reproduction, à condition d'en respecter l’intégrité et d’en mentionner l’auteure, le traducteur, le réviseur et la source.

URL de cet article sur Tlaxcala :
http://www.tlaxcala.es/pp.asp?reference=7239&lg=fr

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